PMT 2013 : Johanna Heinen

« Un mécénat « juif » pour l’art moderne français ? Étude de cas sur la Galerie nationale de Berlin sous l’ère wilhelmienne (1882-1911) »

 

À l’heure actuelle, il existe de nombreuses publications sur Hugo von Tschudi, l’ancien directeur de la Galerie nationale, qui défia la doctrine artistique de l’empereur Guillaume II en achetant dès 1896 des œuvres d’art avant-gardistes, provenant de surcroît de l’ennemie jurée : la France. Jusqu’à la fin de son mandat en 1908, qui s’acheva par une démission « forcée », Tschudi réussit à pourvoir le musée d’une collection de chefs d’oeuvre de l’impressionnisme et du réalisme. La Galerie nationale berlinoise joua ainsi le rôle de précurseur dans l’institutionnalisation de l’art moderne français – pas seulement en Allemagne, mais aussi en France. Mais qui ont été les mécènes prêts à soutenir ces achats audacieux et quels étaient leurs motifs ? Les publications en histoire de l’art se concentrent presque exclusivement sur les mécènes et collectionneurs « juifs » allemands, et expliquent leur engagement par des valeurs telles que le cosmopolitisme et la modernité, qui seraient particulièrement propres à ce « groupe ». S’y ajoute la thèse d’un affront politique de la part d’une bourgeoisie bien établie et sûre d’elle à l’encontre du régime wilhelmien. Le fait que certains des mécènes aient été des « Kaiserjuden », c’est-à-dire des juifs proches de Guillaume II, et que d’autres aient été baptisés depuis plusieurs générations, conduit cependant à une remise en question de la validité de ces approches. Le sujet de cette thèse se trouve à un point d’intersection de l’histoire culturelle franco-allemande. Le premier objectif de cette thèse était de comprendre la motivation des mécènes berlinois, dont la majorité est membre de l’élite économique, à promouvoir un art fortement politisé et contesté. Les résultats de cette analyse, appuyés sur une vaste documentation d’archives, permettent de livrer une relecture complète des motifs du mécénat d’art moderne français pour la Galerie nationale de Berlin.

Johanna Heinen, née en 1980, a étudié les Frankreichwissenschaften – la littérature et la linguistique françaises, avec option histoire de l’art, droit, et sciences politiques à l’Université libre de Berlin, puis elle a effectué un master 1 en histoire de l’art en 2005 à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, et un master 2 d’histoire à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) de Paris en 2006. Elle a fondé et dirigé la revue franco-allemande en ligne rencontres.de, dont elle a été la rédactrice en chef pendant sept ans, avant de se consacrer en 2012 à la rédaction de son doctorat d’histoire en cotutelle entre l’École des hautes études en sciences sociales et l’Université libre de Berlin, qu’elle obtient avec la mention Très honorable avec félicitations du jury.

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